C’est officiel ! Depuis le 19 avril 2023, le salarié qui abandonne son poste et qui ne le reprend pas après avoir été mis en demeure par son employeur, est présumé démissionnaire et ne pourra donc plus percevoir les allocations chômage.

C’est le décret du 17 avril 2023 qui vient préciser la procédure que doit respecter l’employeur qui souhaite actionner le mécanisme de présomption de démission lorsqu’un salarié abandonne son poste de travail.

Pour rappel, jusqu’à présent, lorsqu’un employeur souhaitait rompre le contrat de travail d’un salarié qui avait abandonné son poste de travail, il devait enclencher la procédure de licenciement pour faute. Une fois le contrat rompu, le salarié pouvait percevoir les allocations chômage puisque la rupture du contrat ne venait pas de son initiative.

Pour contrecarrer, cette faille juridique, la loi « marché du travail » du 22 décembre 2022 a créée l’article L.1237-1-1 du code du travail. Ce nouvel article institue une présomption simple de démission en cas d’abandon de poste par un salarié, ce qui a pour effet, de le priver du chômage.

Le décret d’application est venu préciser que le salarié qui abandonne son poste sans motif légitime est présumé avoir démissionné dans un délai de 15 jours minimum (selon les questions réponses mis en ligne par le Ministère travail, il s’agit de jours calendaires, donc les week-ends et les jours fériés sont comptabilisés) suivant la mise en demeure de son employeur de justifier de son absence et de reprendre son poste de travail.

Le délai commence à courir à partir de la date de présentation de la lettre de mise en demeure. Cette dernière pourra se faire soit par lettre recommandée avec accusé de réception soit remise en main propre contre décharge (article R.1237-13 du code du travail).

A noter, qu’il est curieux que le législateur ait prévu la possibilité d’une remise en main propre comme mode de délivrance puisque le salarié est absent de l’entreprise et que c’est cette absence qui justifie d’enclencher la procédure.

Pour que la procédure soit valide, le courrier de mise en demeure doit demander au salarié de justifier de son absence et de reprendre son poste de travail. Il est également recommandé qu’il demande les raisons de l’absence du salarié afin de lui permettre d’apporter d’éventuelles explications et de lui préciser qu’à défaut de réponse dans le délai imparti, il sera présumé démissionnaire et qu’il ne pourra ainsi prétendre à aucune indemnisation de Pôle Emploi.

En réponse à la mise en demeure, le décret prévoit que le salarié peut valablement justifier son absence en invoquant un motif légitime qui serait de nature à faire obstacle à la présomption de démission, tel que :

  • Des raisons médicales ;
  • L’exercice du droit de retrait ;
  • L’exercice du droit de grève ;
  • Le refus d’exécuter une instruction contraire à une réglementation ;
  • Le refus d’exécuter une modification du contrat de travail qui serait à l’initiative de l’employeur, sans que le salarié ait donné son accord

A noter que l’employeur n’est pas forcé de recourir à cette procédure de mise en demeure, lorsqu’il constate un abandon de poste. Il peut également décider de ne pas agir : dans ce cas, le contrat de travail du salarié sera suspendu, le salarié restera dans les effectifs de l’entreprise, mais il ne sera pas rémunéré.

Ce n’est que s’il souhaite rompre la relation de travail, que l’employeur devra mettre en œuvre la procédure de présomption de démission.

Les questions-réponses du Ministère ont confirmé que l’employeur qui a enclenché la procédure de présomption de démission, n’a pas à demander au salarié qu’il confirme sa démission par écrit même si la convention collective dont ils relèvent l’exige.

Le salarié qui souhaite contester la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption de démission doit saisir le bureau de jugement du conseil de prud’hommes. Ce dernier devra évaluer la qualité de la justification avancée par le salarié et se prononcer sur les conséquences de la rupture du contrat de travail. S’il estime que les motifs apportés par le salarié sont légitimes alors dans ce cas la rupture du contrat sera imputable à l’employeur et elle produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (dans ce cas, le salarié bénéficiera des indemnités de rupture afférentes et il pourra prétendre aux allocations chômage). Dans le cas contraire, la rupture du contrat de travail produira bien les effets d’une démission, privative des allocations chômage.

Le conseil de prud’hommes devra statuer au fond dans un délai de 1 mois à compter de sa saisine (Décret n°2023-275, 17 avril 2023, JO 18 avrilQuestions-Réponses du Ministère du travail : Présomption de démission en cas d’abandon de poste).

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