Pas d’obligation pour l’employeur d’informer le salarié de son droit à demander des précisions sur les motifs de son licenciement !

(Cour de cassation, chambre sociale, 29 juin 2022 n°20-22-220)

Depuis les ordonnances « Macron » de 2017, les motifs de licenciement énoncés dans la notification envoyée au salarié peuvent faire l’objet d’une précision à la demande du salarié ou à l’initiative de l’employeur dans les 15 jours suivant la notification par courrier recommandé avec accusé de réception ou la remise en main propre du courrier.

Pour rappel, un salarié qui n’a pas présenté auprès de son employeur une demande de précisions des motifs de son licenciement ne peut se prévaloir d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison d’une insuffisance de motivation du courrier de licenciement. Il ne pourra que prétendre à l’indemnité fixée à l’article L.1235-2 du code du travail, qui ne peut excéder un mois de salaire.

Avec cet arrêt du 29 juin dernier, la Cour de cassation a statué pour la première fois sur la question de savoir si l’employeur avait l’obligation d’informer le salarié au sein du courrier de licenciement qu’il peut demander des précisions sur les motifs du dit-licenciement, dans un délai de 15 jours.

Dans cette affaire, une salariée a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de nullité de son licenciement, au motif que sa lettre de licenciement était insuffisamment motivée et que l’employeur ne l’a pas informée de son droit à lui demander des précisions sur les motifs de son licenciement.

La Haute Juridiction considère que la lettre de licenciement de la salariée est suffisamment motivée, et par conséquent que son licenciement est fondé. Elle rappelle qu’aucune disposition légale n’impose à l’employeur d’informer la salariée de son droit de demander des précisions concernant les motifs de son licenciement.

La Cour de cassation va également mettre en avant le fait que le motif de licenciement était suffisamment précis et matériellement vérifiable, en dépit de certains éléments manquants comme la date et la durée des faits reprochés.

 

Consultation du CSE : le report du terme du délai de consultation en accord avec l’employeur empêche l’application des délais réglementaires, même en cas d’expertise

(Cour de cassation, chambre sociale, 29 juin 2022, n°21-11.077)

Pour rappel, lorsqu’il est consulté, le CSE, ou le CSE central le cas échéant, dispose de délais pour rendre un avis motivé. Ces délais doivent lui permettre d’exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l’importance des questions qui lui sont soumises (article L. 2312-16 du code du travail).

Ce délai peut être fixé soit par accord collectif ou à défaut par accord entre l’employeur et le CSE à la majorité des membres titulaires. Ce n’est qu’à défaut d’accord que sont applicables les délais réglementaires fixés par le code du travail (articles R. 2312-5 et R. 2312-6 du code du travail).

En outre, la Cour de cassation a déjà admis la possibilité de conclure un accord de prolongation des délais de consultation (Cour de cassation, chambre sociale, 8 juillet 2020, N°19-10.987).

A cet égard, la Haute juridiction s’est tout récemment positionnée sur les conséquences d’un tel report dans un cas d’espèce où le CSE, après avoir conclu avec l’employeur le report du terme du délai de consultation sur la politique sociale de l’entreprise, a ensuite opposé à l’employeur les délais réglementaires en raison de sa décision de recourir à une expertise.

Or, les documents transmis par l’employeur dans le cadre de la consultation précitée l’ont été lors de la réunion prévue à cet effet le 30 septembre 2020, pour laquelle il n’existait alors aucun accord relatif aux délais de consultation.

Une seconde réunion s’est déroulée 1 mois après, soit le 30 octobre 2020, date à laquelle l’avis du CSE ne pouvait être rendu, le point de l’ordre du jour relatif à la politique sociale n’ayant pu être évoqué par manque de temps.

L’employeur et le CSE sont alors convenus d’une nouvelle date de réunion fixée le 12 novembre 2020, à laquelle ils ont été convoqués le 2 novembre 2020. Lors de cette réunion, le CSE informe l’employeur de sa décision de recourir à une expertise dans le cadre de cette consultation.

Or, l’employeur a contesté cette délibération considérant que le terme du délai de consultation avait été reporté au 12 novembre, date à laquelle le CSE devait définitivement rendre son avis, les délais réglementaires ne pouvant selon lui s’appliquer rétroactivement à défaut d’accord.

Dans un premier temps, le tribunal a retenu le raisonnement du CSE jugeant que le recours à une expertise justifiait l’application des délais réglementaires, soit un délai de deux mois avec effet rétroactif à compter du point de départ.

Désapprouvant les juges du fond, la Cour de cassation a censuré leur décision considérant « que cet accord excluait l’application des délais réglementaires fixés, à défaut d’accord, par l’article R. 2312-6 du code du travail et qu’au jour où il statuait, le délai étant échu, le comité était réputé avoir émis un avis négatif de sorte que l’expertise ne pouvait qu’être annulée » pour les deux raisons suivantes :

  • le point de départ du délai de consultation court à compter de la communication des informations par l‘employeur, soit le 30 septembre 2020 ;
  • le report du terme du délai au 12 novembre a été décidé d’un commun accord.

Ainsi, compte tenu de la prééminence d’un tel accord sur les délais réglementaires, il convient par prudence de s’accorder précisément sur les termes de l’accord conclu pour éviter toute déconvenue.

 

La DREETS compétente pour décider de la répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux, uniquement si la négociation a été loyale

(Cour de cassation, chambre sociale, 12 juillet 2022, n°21-11.420)

Pour rappel, l’article L. 2314-13 du code du travail permet le recours à l’autorité administrative en cas de désaccord persistant entre l’employeur et les organisations syndicales sur la répartition des sièges et des électeurs entre les différents collèges.

Dans cette affaire, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser les critères de recevabilité d’une demande de saisine de l’administration pour ce motif.

Selon elle, bien que la négociation entre l’employeur et les organisations syndicales se soit soldée par un échec, il faut que cette dernière ait été loyale et sérieuse.

Dans le cas d’espère, les juges retiennent que les entreprises composant l’UES ont manqué à leur obligation de loyauté dans le cadre de cette négociation du protocole d’accord préélectoral, et ce à plusieurs égards. En effet, les employeurs n’ont pas communiqué aux organisations syndicales les éléments déterminants tels que les effectifs par site et la classification professionnelle des salariés, malgré leurs demandes répétées. Ils ont également tardé à actualiser les informations relatives aux effectifs et n’ont pas donné accès aux organisations syndicales aux registres uniques du personnel. Les employeurs ont ensuite mis fin unilatéralement à la négociation du protocole d’accord préélectoral.

La Cour de cassation considère donc qu’au vu de l’absence de loyauté, la DREETS ne pouvait pas décider de la répartition des sièges et du personnel entre les collègues électoraux.