Les restrictions pouvant être apportées à la liberté de circulation des représentants du personnel.

(Cass. Soc.10 février 2021, n°19-14021)

Les articles L. 2143-20 et L. 2315-14 du Code du travail prévoient que pour l’exercice de leurs fonctions, les représentants du personnel et les représentants syndicaux peuvent, tant durant les heures de délégation qu’en dehors de leurs heures habituelles de travail, circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous les contacts nécessaires à l’accomplissement de leur mission, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés.

Quid en cas de grève ? L’employeur peut-il restreindre cette liberté de circulation prévue par le code du travail ? Si oui, dans quelles conditions ?

Dans l’affaire de février dernier, une grève a été organisée par des salariés de la société de nettoyage des chambres d’un hôtel parisien. Leurs revendications portaient notamment sur leur rémunération et leur statut.

À la suite de débordements, l’employeur a mis en place des restrictions provisoires parmi lesquelles une restriction d’accès conditionnée à l’absences de sifflets, de mégaphones ainsi qu’une autorisation pour entrer dans les chambres de l’hôtel.

Des salariés ont saisi le tribunal en invoquant l’entrave et les atteintes au droit de grève. De plus, ils ont demandé la fin des restrictions afin que leur liberté de circulation soit respectée.

La Cour de cassation ne fait pas droit à leurs demandes. Pour elle, la liberté de circulation des représentants du personnel et des représentants syndicaux peut donner lieu à restriction au regard d’impératifs de santé, d’hygiène ou de sécurité ou en cas d’abus.

La Cour de cassation a considéré que le comportement des représentants avait apporté une gêne anormale au travail des salariés et à la clientèle de l’hôtel. En effet, les grévistes avaient fait usage de mégaphones et de sifflets dans l’enceinte de l’hôtel et étaient montés dans les étages pour interpeller et intimider les salariés non-grévistes.

Ces comportements ont été jugés abusifs et constitutifs d’un trouble manifestement illicite. Ils permettaient à l’employeur d’imposer des restrictions d’entrée. Ces dernières ont été jugées proportionnées aux abus constatés.

L’accord de mise en place du CSE met forcément fin aux mandats en cours des anciennes IRP.

(Cass.soc.10 février 2021, n°19-14021)

L’ordonnance 2017-1386 du 22 septembre 2017 a prévu des mesures transitoires pour faciliter le passage des anciennes institutions représentatives du personnel (IRP) au comité social et économique (CSE).

Concernant ces mesures, il y figure la possibilité d’aménager l’échéance des mandats en cours en les réduisant ou en les prorogeant, soit par la voie de la négociation collective, soit par une décision   unilatérale de l’employeur après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Cette disposition a pour objet d’éviter que deux institutions représentatives du personnel se superposent à la suite de l’installation du CSE.

En l’espèce, un accord collectif prévoit la mise en place d’un CSE unique pour toute l’entreprise conclu entre l’employeur et trois syndicats représentatifs au sein d’une société composée de comités d’établissements.

Au sein de cet accord, il n’existe aucune disposition particulière prévoyant de régler le sort des mandats en cours, des membres du CE. Aucune décision unilatérale de l’employeur n’est prise sur ce sujet.

Le 2 juillet 2018, les élections afin de mettre en place un CSE ont lieu. Dans le cadre d’un déclenchement de mouvement de grève, l’employeur convoque le CE. Réunion immédiatement annulée. L’employeur estime que l’existence du CE a pris fin dès l’instant où les membre du CSE ont été élus.

Les salariés estiment que les mandats des membres du CE se poursuivent au-delà de la mise en place du CSE et jusqu’à leur terme, faute d’accord ou de décision unilatérale réduisant leur durée, saisissent en référé le président du tribunal de grande instance pour lui demander d’ordonner à l’employeur de réunir sans délai le CE.

La Cour de cassation considère que l’accord conclu pour la mise en place du CSE unique à toute l’entreprise avait implicitement réduit les mandats en cours des anciens membres du CE, qui ont pris fin au jour de la mise en place du CSE.

Il n’est donc pas nécessaire qu’un accord collectif ou une décision unilatérale de l’employeur prévoit expressément d’avancer le terme des mandats en cours, pour considérer que ces derniers ont pris fin au jour de la mise place du CSE. Il suffit qu’un accord relatif à la mise en place du CSE soit conclu et que les élections du CSE aient lieu.

Les conséquences de la nullité du licenciement.

(Cass. Soc. 10 février 2021 n°19-20.397)

La loi et la jurisprudence prévoient de nombreuses hypothèses dans lesquelles la nullité du licenciement peut être prononcée. Pour les plus connues d’entre elles, il va s’agir du licenciement d’une salariée en état de grossesse (article L.1225-71 du Code du travail), du licenciement prononcé en raison d’un motif discriminatoire, du salarié licencié en raison de son état de santé ou encore du salarié qui a témoigné sur un harcèlement moral ou sexuel (articles L.1152-1 et L.1153-1 du Code du travail).

Le licenciement nul ne présente pas les mêmes conséquences que le licenciement sans cause réelle et sérieuse qui donne quant à lui droit à des indemnités barémisées. Le licenciement nul permet deux choses :

  • Soit la réintégration du salarié dans l’entreprise ;
  • Soit une indemnisation au titre de la nullité du licenciement.

Dans cette récente affaire, un salarié avait été victime de harcèlement moral et avait été licencié pour avoir dénoncé ces faits. Il a alors intenté une action devant le conseil de prud’hommes afin d’obtenir la nullité de son licenciement. Les juges lui donnent gain de cause, et ordonnent la réintégration du salarié dans son précédent emploi, ou à défaut dans un emploi équivalent.

L’employeur décide de se pourvoir en cassation en invoquant le fait que la réintégration est impossible. En effet, le salarié avait entre temps retrouvé un emploi. La Haut Juridiction va le débouter, et préciser que le droit à réintégration n’est pas dissout par le seul fait que le salarié ait retrouvé un nouvel emploi.

Cette décision vient renforcer les sanctions du licenciement nul, et renforce également le choix du salarié qui peut opter pour l’indemnisation pécuniaire ou la réintégration dans son précédent emploi.