Attention à la notion de CDD d’usage !

(Cass. Soc. 14 octobre 2020 n°18-26.832)

Le CDD d’usage, plus connu sous le nom de « CDD d’extra », est un type de CDD particulier. Il permet à l’employeur d’embaucher un salarié pour exécuter une tâche précise et par nature temporaire (article L.1242-2 du code du travail).

La possibilité de recourir au CDD d’usage est subordonnée au respect de trois critères cumulatifs :

  • Un secteur d’activité spécifique prévu par l’article D.1242-1 du code du travail (tourisme, service à la personne, restauration, spectacle, bâtiment, etc…) ;
  • L’existence d’un usage constant ;
  • Le caractère temporaire de l’emploi.

Par conséquent, le salarié embauché en extra est censé travailler de manière occasionnelle et irrégulière, pour des missions allant de quelques heures à quelques jours.

Dans l’affaire du 14 octobre dernier, une salariée était embauchée comme hôtesse de table en CDD d’extra. Au cours de 5 années, la salariée avait conclu avec l’employeur 188 contrats de travail pour des vacations variant d’un à quatre jours par semaine.

Au vu de ces éléments qui présentaient un caractère répétitif et régulier, la Cour de cassation a estimé que la condition du caractère temporaire de l’emploi inhérente au CDD d’extra n’était pas caractérisée.

La conclusion des 188 CDD d’extra et la régularité du travail de la salariée contrevenaient à la définition-même du CDD d’usage. Par conséquent, la Cour de cassation a pu sans difficulté considérer que l’emploi de la salariée était en réalité indispensable à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Ainsi, la Haute Juridiction a pu prononcer la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.

Précision sur le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes.

(Cass. Soc. 14 octobre 2020 n°19-11.508)

La loi permet à un membre du CSE d’exercer un droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes. En effet, si un élu constate une atteinte aux droits d’un salarié, à sa santé physique ou mentale ou à ses libertés individuelles qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché, il doit en alerter immédiatement l’employeur afin qu’une enquête s’ouvre (article L.2312-59 du code du travail). A l’issue de l’enquête, si des divergences perdurent entre l’élu et l’employeur concernant cette atteinte ou concernant les mesures à prendre pour la faire cesser, le juge du conseil des prud’hommes est saisi en référé afin de statuer sur l’affaire.

La loi a pu préciser que l’atteinte en question pouvait résulter d’une mesure discriminatoire, que cette discrimination ait lieu en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de promotion, etc… mais également d’un cas de harcèlement moral ou sexuel.

La décision du 14 octobre dernier est venue préciser la notion d’ « atteinte aux droits des personnes ».

La jurisprudence a déjà par le passé écarté la possibilité de réaliser un droit d’alerte pour réclamer le paiement d’arriérés de salaire ou d’heures supplémentaires (Cass. Soc. 3 février 1998 n°96-42.062).

Dans cette nouvelle affaire, un élu a entendu exercer son droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes en raison d’une erreur sur le mode de calcul des indemnités compensatrices de congés payés des salariés intérimaires.

La Haute Juridiction a pu rappeler ainsi que cette demande n’entrait pas dans le cadre légal du droit d’alerte au sens de l’article L.2312-59 du code du travail, puisque la formule de calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés ne porte pas atteinte à la santé physique ou mentale des salariés, ni à leurs libertés individuelles.

La prépondérance des accords collectifs sur le budget d’Activités sociales et culturelles.

(Tribunal judiciaire de Paris, 8 septembre 2020 n°20/55245)

L’article L.2312-81 du code du travail donne une place prépondérante à l’accord collectif négocier au sein de l’entreprise, bien que le CSE assure la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établie dans l’entreprise et que le mode de financement n’impact guère le contrôle et la participation du CSE sur celui-ci (article L.2312-78 du code du travail).

Il est affirmé dans cette décision la nouvelle hiérarchie des normes. A savoir, qu’il est dorénavant possible aux entreprises de moduler par accord collectif la contribution de l’employeur aux activités sociales et culturelles.

En l’espèce, la gestion de restaurant d’entreprise est déléguée à l’employeur. Agissant par délégation du CSE, l’employeur ne devrait agir que pour le compte du comité (Cass. Soc. 28 janvier 1971, n°69-13.861). Néanmoins, la Cour de cassation sur la base de l’article L.2312-81 du code du travail, a décidé que « le comité d’entreprise n’avait pas qualité pour intenter une action visant à obtenir l’exécution des engagements résultant de la convention collective applicable, cette action étant réservée aux organisations ou groupements définis à l’article L.2231-1 du Code du travail qui ont le pouvoir de conclure une convention ou un accord collectif de travail » (Cass. Soc. 1er juillet 2020, n°18-21.924).

Par conséquent, c’est à bon droit que l’employeur a engagé une procédure de négociation d’accord collectif avec les partenaires sociaux pour modifier sa contribution au budget des œuvres sociales, de nature à s’adapter au contexte actuel. En effet, la majorité des salariés se trouvent en télétravail. De ce fait, ils ont déserté les deux restaurants d’entreprise. Ainsi, il a été conclu par accord collectif la fin de la prise en charge des deux restaurants au profit d’une augmentation de l’allocation des tickets restaurant.

Il revient que le nouveau diptyque affirme la place prépondérante de l’accord collectif au détriment des prérogatives reconnues au CSE (article L. 2312-14 du code du travail). L’autonomie du CSE ne permet pas de faire échec à toute mesure prise par accord collectif. Dès lors que le CSE n’est pas l’interlocuteur privilégier de l’employeur dans le cadre de la négociation collective, il doit se soumettre à la tutelle des organisations syndicales concernant son financement.