(Cass. Soc. 7 juillet 2021 n°19-22.902)
L’articulation entre la loi et la convention collective n’est pas simple en matière de période d’essai. En effet, la loi du 25 juin 2008 a institué une durée légale de la période d’essai comme suit :
- 2 mois pour les ouvriers et employés ;
- 3 mois pour les agents de maîtrise et techniciens ;
- 4 mois pour les cadres (article L. 1221-19 du code du travail).
L’article L.1221-21 du code du travail prévoit également la possibilité d’un renouvellement de la période d’essai sans dépasser le double de la durée légale précitée.
Les choses se complexifient lorsque des accords de branche conclus avant l’entrée en vigueur de la loi de 2008 ont prévu des durées plus longues. Dans ce cas, ces durées plus longues vont s’appliquer dès lors qu’elles demeurent raisonnables.
Dans cette affaire du 7 juillet dernier, il était question de savoir si la durée fixée au sein de l’accord de branche était raisonnable ou non, car elle était plus longue que la durée fixée à l’article L.1221-19 du code du travail.
La Cour de cassation va préciser que le caractère raisonnable doit s’apprécier en fonction de la catégorie d’emploi occupé. Les juges doivent analyser la nature des fonctions et les responsabilités confiées au salarié pour apprécier si la durée de la période d’essai est raisonnable ou non.
La Haute Juridiction va donc au-delà de la classification professionnelle fixée au sein du code du travail, et s’attache davantage aux fonctions réellement exercées par le salarié.
Il s’agit d’un enjeu de taille, puisque si les juges considèrent que la durée conventionnelle de la période d’essai n’est pas raisonnable, la rupture de cette dernière s’analyse alors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 11 novembre 2012 n°10-17.945).
Identification de toutes les possibilités de reclassement même en CDD dans le cadre d’un PSE
(Conseil d’État du 22 juillet 2021 n° 434362)
L’article L. 1233-61 du code du travail prévoit que le PSE doit intégrer « un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile ».
L’employeur doit, ainsi, procéder à une recherche sérieuse des postes de reclassement disponibles dans l’entreprise ou, si elle appartient à un groupe, parmi les entreprises du groupe, situées en France, et dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation leur permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel (Cass. soc. 13-7-2010 n° 09-43.028).
Dans cette affaire, l’administration saisie d’une demande d’homologation du document unilatéral portant PSE a vérifié la conformité du plan de reclassement aux règles légales.
Elle a ainsi vérifié que le plan comportait des mesures concrètes et précises de nature à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre. Le plan devait par conséquent préciser notamment le nombre, la nature et la localisation des postes de reclassement.
Le Conseil d’État ajoute une nouveauté. L’employeur doit identifier tous les emplois disponibles dans le cadre d’un reclassement internet et ce qu’elle que soit la durée des contrats de travail susceptibles d’être proposées pour y pourvoir.
En l’espèce, le PSE restreignait les offres de reclassement aux emplois susceptibles d’être pourvus par contrat à durée indéterminée ou contrat à durée déterminée d’au moins 3 mois. À tort, selon le Conseil d’État.
Toutefois, comme le plan comportait d’autres mesures d’accompagnement (mise en place d’une antenne emploi, aides financières individuelles à la formation, à la recherche d’emploi et à la mobilité géographique et aides à la création d’entreprise) les juges ont considéré que les mesures prévues par le PSE étaient suffisantes.
Le fait que les contrats de moins de 3 moins n’aient pas été proposés ne justifiait pas l’annulation de la décision d’homologation.
PSE homologué : l’inspecteur du travail n’examine pas le périmètre de recherche du reclassement
(Conseil d’État, 22 juillet 2021, n°427004)
L’instauration d’un contrôle administratif des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) par la loi du 14 juin 2013, dite de sécurisation de l’emploi, a entrainé la nécessité de définir les rôles respectifs des autorités administratives en cas de licenciement d’un salarié protégé dans le cadre d’un licenciement collectif accompagné d’un PSE.
Le licenciement doit être autorisé par l’inspecteur du travail, l’homologation, du document unilatéral de l’employeur ou la validation de l’accord collectif contenant le PSE relève depuis cette loi du directeur régional du travail (anciennement la Direccte, devenue la Dreets).
Le Conseil d’État s’est déjà positionné sur le partage des tâches, l’inspecteur du travail : il doit s’assurer de l’existence, à la date à laquelle il statue sur une demande d’autorisation, d’une décision de validation ou d’homologation du PSE, à défaut de laquelle il doit refuser le licenciement du salarié protégé. Cependant, il ne lui appartient pas d’apprécier la validité du PSE, ni plus généralement, de procéder aux contrôles incombant au directeur régional.
L’arrêt rendu par le Conseil d’État le 22 juillet 2021 applique ce principe à propos du périmètre dans lequel est recherché le reclassement du salarié au sein d’un groupe de sociétés.
En l’espèce, un PSE établi par un liquidateur judiciaire avait été homologué par la Direccte. Un salarié protégé dont le licenciement a été validé, a contesté la décision administrative. La cour administrative d’appel avait annulé la décision d’autorisation du ministre du travail, au motif que la recherche de reclassement aurait dû être étendue à une autre société qui compte tenu de l’organisation, des activités, ou le lieu d’exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec l’entreprise employeur, d’y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
Le Conseil d’État annule l’arrêt de la cour administrative d’appel pour une erreur de droit. En effet, pour homologuer le document unilatéral incluant le PSE, l’administration vérifie notamment que le PSE est conforme à l’article L.1233-61 du code du travail.
Il ne relève pas de l’inspecteur du travail de contrôler ce point et de remettre en cause, le périmètre de reclassement déterminé par le PSE et approuvé par l’administration.