Une salariée a déposé une réclamation auprès du Défenseur des droits pour des faits de harcèlement sexuel et de harcèlement d’ambiance subis dans le cadre de son emploi et de ses fonctions syndicales.

Elle accuse un collègue, également syndicaliste, d’avoir tenu des propos à caractère sexuel et de l’avoir agressée sexuellement. Bien qu’elle ait mentionné cette agression à une collègue immédiatement après les faits, elle indique avoir souffert d’une amnésie traumatique. Elle a ensuite signalé ces faits au secrétaire général du syndicat, avant de les dénoncer à son employeur, qui a initié une enquête interne.

Cette enquête, menée par la direction et une psychologue, a inclus l’audition de plusieurs témoins. Cependant, l’employeur a conclu qu’aucun témoin ou preuve ne permettait de corroborer directement les accusations de harcèlement sexuel.

La Défenseure des droits a rappelé, dans sa décision du 11 juillet 2024 (n°2024-105), que le harcèlement sexuel est considéré comme une forme de discrimination, en vertu du droit européen et de la loi française, dès lors qu’il a lien avec un critère prohibé, à savoir le sexe. Le harcèlement sexuel est défini comme un comportement à connotation sexuelle qui porte atteinte à la dignité d’une personne ou crée un environnement intimidant ou hostile. En tant que discrimination, la Défenseure des droits est compétent pour traiter ce type de litige, selon l’article 4 de la loi n° 2011-333.

La Défenseure des droits a souligné que l’aménagement de la charge de la preuve en matière de harcèlement sexuel dispense la victime d’apporter des preuves directes. Il lui suffit de présenter un faisceau d’indices convergents, ce qui permet de faire naître un doute raisonnable.

En l’espèce, la salariée a produit plusieurs éléments de preuve, notamment des SMS, des attestations et des témoignages de collègues, qui, selon la Défenseure, étaient suffisamment nombreux et concordants pour étayer ses accusations. Par ailleurs, il est apparu que le salarié accusé avait reconnu certains propos à connotation sexuelle, et d’autres collègues ont également rapporté avoir été témoins de comportements sexistes.

En analysant les conclusions de l’enquête interne, la Défenseure a critiqué leur manque de cohérence avec les auditions réalisées. Bien que l’enquête ait conclu à l’absence de harcèlement sexuel, elle recommandait paradoxalement des mesures visant à éloigner la victime de son agresseur présumé et à rappeler les bonnes pratiques relationnelles au sein du syndicat. Cette contradiction entre les conclusions et les mesures suggérées a conduit la Défenseure à juger que l’enquête n’avait pas de valeur.

La Défenseure des droits a également relevé plusieurs dysfonctionnements dans la conduite de l’enquête, notamment sa durée excessive et l’absence d’audition de certains témoins cités par la victime. Elle a rappelé que l’enquête interne doit respecter les principes de loyauté, d’impartialité et de célérité.

En l’espèce, l’enquête, qui a débuté en mai 2021 et s’est conclue en février 2022, était trop longue au regard de la jurisprudence actuelle. De plus, la Défenseure a souligné que les salariés mis en cause n’avaient pas été sanctionnés, ce qui constitue un manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur prévue par le Code du travail.

En conclusion, la Défenseure des droits a reconnu que la salariée avait été victime de harcèlement sexuel et d’harcèlement d’ambiance, et que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité. Elle a recommandé que l’employeur prenne contact avec la victime pour réparer le préjudice subi et modifie ses pratiques d’enquête. L’entreprise dispose d’un délai de trois mois pour se conformer à ces recommandations.

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