• Qu’est-ce que la GPEC ?

Conformément à l’article L. 2242-2 du code du travail, les entreprises d’au moins 300 salariés ont l’obligation de négocier sur la gestion prévisionnelle des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers.

Le code du travail ne nous apporte que peu d’informations relatives à ce dispositif. En réalité, ce dispositif vise notamment à réduire de façon anticipée les écarts entre les besoins et les ressources humaines de l’entreprise, en mettant en œuvre un plan stratégique ou des objectifs à moyen terme. Le but du dispositif est également d’impliquer les salariés dans un projet d’évolution professionnelle.

L’employeur est tenu d’engager la négociation avec les délégués syndicaux de l’entreprise a minima une fois tous les quatre ans. L’obligation de l’employeur tient à l’ouverture de la négociation, mais pas à la conclusion d’un accord portant sur la GPEC. A l’issue des négociations, si aucun accord n’est conclu, il convient de rédiger un procès-verbal de désaccord, où sont mentionnées les mesures que l’employeur entend mettre en œuvre unilatéralement.

Pour rappel, l’article L. 2242-20 du code du travail fixe les thèmes obligatoires de la négociation sur la GPEC :

    • La mise en place d’un dispositif de GPEC, notamment pour répondre aux enjeux de la transition écologique, ainsi que sur les mesures d’accompagnement susceptibles de lui être associées, en particulier en matière de formation, d’abondement du compte personnel de formation, de validation des acquis de l’expérience, de bilan de compétences ainsi que d’accompagnement de la mobilité professionnelle et géographique des salariés ;
    • Le cas échéant, les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise prévue à l’article L. 2254-2, qui doivent, en cas d’accord, faire l’objet d’un chapitre spécifique ;
    • Les grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l’entreprise et les objectifs du plan de développement des compétences, en particulier les catégories de salariés et d’emplois auxquels ce dernier est consacré en priorité, les compétences et qualifications à acquérir pendant la période de validité de l’accord ainsi que les critères et modalités d’abondement par l’employeur du compte personnel de formation ;
    • Les perspectives de recours par l’employeur aux différents contrats de travail, au travail à temps partiel et aux stages, ainsi que les moyens mis en œuvre pour diminuer le recours aux emplois précaires dans l’entreprise au profit des contrats à durée indéterminée ;
    • Les conditions dans lesquelles les entreprises sous-traitantes sont informées des orientations stratégiques de l’entreprise ayant un effet sur leurs métiers, l’emploi et les compétences ;
    • Le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l’exercice de leurs fonctions.
  • Le CSE est-il informé et consulté en matière de GPEC ?

Suite aux ordonnances « Macron » du 22 septembre 2017 qui ont créé l’instance représentative unique du Comité Social et Economique (CSE), l’article L. 2312-14 du code du travail rappelle que le comité n’est plus consulté sur les projets d’accord collectif, ni sur leur révision ou leur dénonciation. En effet, cette compétence est dévolue aux délégués syndicaux de l’entreprise.

Ce même article prévoit en outre que les entreprises ayant conclu un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ne sont pas soumises, pour ce domaine, à l’obligation de consulter le CSE.

Dans une décision du 29 mars 2023, la Cour de cassation s’est prononcée sur la portée de cette disposition (Cour de cassation, chambre sociale, 29 mars 2023, n°21-17.729). La question qui a été étudiée par la Cour de cassation était la suivante : cette dispense de consultation du CSE est-elle valable dans le cadre de toutes les consultations du CSE ou uniquement dans le cadre des consultations récurrentes du CSE ?

Dans cette affaire de 2023, il était question d’un accord de groupe relatif à la GPEC conclu afin de favoriser le développement professionnel et l’emploi par des démarches d’anticipation. Une entreprise comprise dans le périmètre de l’accord a informé le CSE d’un projet d’adaptation des compétences, mais n’a pas soumis ce projet à la consultation du CSE car il était question d’une mise en œuvre de l’accord de GPEC.

Le CSE a saisi le tribunal judiciaire en référé en vue d’obtenir l’ouverture d’une information-consultation sur le projet.

Le litige a ensuite été porté devant la Cour d’appel qui a ordonné l’ouverture d’une procédure de consultation sur ce projet, la communication au CSE de l’intégralité des informations nécessaires permettant d’appréhender le projet et ses conséquences sur les conditions de travail et l’emploi des salariés ainsi que la suspension du projet jusqu’à la consultation régulière du CSE.

La Cour de cassation va rappeler les bases en matière de GPEC. Elle rappelle que, dans le cadre de la consultation annuelle sur les orientations stratégiques de l’entreprise, le CSE est consulté sur les orientations stratégiques de l’entreprise, définies par l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance de l’entreprise, et sur leurs conséquences sur l’activité, l’emploi, l’évolution des métiers et des compétences, l’organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l’intérim, à des contrats temporaires et à des stages. Cette consultation porte, en outre, sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), sur les orientations de la formation professionnelle et sur le plan de développement des compétences.

La Haute Juridiction rappelle que l’article L. 2312-14 du code du travail permet une dérogation à ce principe de consultation lorsqu’un accord collectif sur la GPEC a été conclu dans l’entreprise.

Par ailleurs, il convient de ne pas oublier que le CSE est consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, au sens de l’article L. 2312-8 du code du travail.

Par conséquent, la Cour de cassation considère que l’employeur ne peut pas se dispenser de consulter le CSE en la matière, car il s’agissait en pratique d’une consultation ponctuelle issue de l’article L. 2312-8 du code du travail, et non d’une consultation récurrente portant sur les orientations stratégiques.

La Haute Juridiction réaffirme donc de manière forte que les sujets touchant à la GPEC doivent impérativement faire l’objet d’une consultation du CSE, à l’exception de la consultation sur les orientations stratégiques lorsqu’un accord collectif portant sur la GPEC a été conclu dans l’entreprise.

Cet arrêt est donc bienvenue et vient renforcer le rôle du CSE en matière de GPEC.

Des questions sur ce sujet ?

Nous y répondons dans le cadre de notre assistance en relations du travail pour les CSE.